La signification de la Journée du chandail orange : discussion avec Helena Mazawasicuna et Melissa Tacan

Nous sommes aujourd'hui le 30 septembre, Journée du chandail orange (en anglais seulement) – une journée où nous profitons de l'occasion pour avoir une discussion pertinente sur les effets des pensionnats et les répercussions qu'ils continuent d'avoir sur les Autochtones et leurs communautés. Il s'agit d'une journée pendant laquelle tous les Canadiens peuvent s'unir dans un esprit de réconciliation et écouter les histoires des survivants et de leurs familles.

Sur une note personnelle, je contribue au blogue Parlons carburant depuis environ cinq ans et j'ai eu l'occasion de m'entretenir avec de nombreuses personnes remarquables. Cependant, l'entretien dont vous faisons part aujourd'hui est pour moi l'un des plus uniques. J'ai eu le privilège de discuter avec deux de nos associées à l'établissement Petro-Canada de Sioux Valley, qui se trouve sur le territoire de la Première Nation Sioux Valley Dakota près de Griswold, au Manitoba : il s'agit de Helena Mazawasicuna et Melissa Tacan. Helena est directrice générale de l'établissement, et Melissa, une membre de son équipe.

Parlons carburant : Merci, Helena et Melissa, de discuter avec moi aujourd'hui. Pouvez-vous nous parler de l'établissement Petro-Canada de Sioux Valley et de son histoire?

Bien que l'établissement Petro-Canada de Sioux Valley existe depuis 2016, il a officiellement ouvert ses portes le 31 janvier 2017 et il compte 18 employés. Nous offrons de nombreuses possibilités d'emploi. Nous voulons aider la nouvelle génération à concilier le travail et les études ou à travailler l'été. Question de lui donner un élan pour qu’elle puisse avancer. Et tout n’est pas centré sur l’emploi. Nous enseignons à ces jeunes à ouvrir un compte bancaire et à économiser de l'argent.

L'établissement Petro-Canada forme une grande partie de notre collectivité, surtout cette année. Lorsque la réserve de la Première Nation Sioux Valley Dakota a été soumise à un confinement en raison de la COVID-19, nous étions la principale source d'approvisionnement en nourriture et en carburant. Notre établissement est resté ouvert tout ce temps et a fourni à la réserve des paniers pendant la crise de la COVID-19.

Parlons carburant : Aujourd'hui est la Journée du chandail orange. Pour que les lecteurs de Parlons carburant puissent commencer à comprendre l'importance de cette journée, pourriez-vous nous faire part des répercussions des pensionnats sur votre communauté?

Nous pouvons parler uniquement au nom des survivants des pensionnats de Sioux Valley, dont nous nous faisons les représentantes. Nous n'avons pas fréquenté de pensionnat, mais nos familles, oui. Nous pouvons parler de l'expérience qu'elles ont vécue.

Mon époux (Helena) m'a raconté des histoires concernant son père, qui a été pensionnaire. Ses histoires sont difficiles à écouter. Il y avait tellement de mauvais traitements. Physiques. Sexuels. Les enfants étaient tout simplement enlevés à leurs familles. Il a passé de nombreuses années au pensionnat.

Mon père (Melissa) était un jeune enfant lorsqu'il a été emmené là-bas. On l'a obligé à apprendre l'anglais. Obligé à renoncer à sa langue. Battu lorsqu'il parlait sa langue maternelle. La peur qui s'est installée en lui en raison de cette expérience l'habite encore aujourd'hui.

Parlons carburant : Comment les expériences comme celles vécues par les membres de vos familles influent-elles sur votre Nation aujourd'hui?

La personne devient un survivant et rentre à la maison... Mais qu'est-ce qui l'attend? Ses parents sont effrayés, s'ils sont toujours en vie. La personne a peur de parler, a peur de ses propres cérémonies. Peur de ses émotions. Il arrive parfois qu'un survivant ne soit plus fonctionnel. Enfants, les survivants n'ont pas reçu ce dont ils avaient besoin. Pas d'amour. Pas de câlins. Personne ne leur a appris comment mener leur vie lorsqu'ils étaient jeunes.

Ils sont maintenant des adultes et ils ne peuvent pas travailler. Ou ils ne savent pas comment être un parent. Parfois, leurs enfants leur sont retirés.

Ceux qui passent sur notre route principale peuvent toujours voir la maison dans laquelle vivait l'agent de l'autorité indienne. Nous la voyons tous les jours. Elle nous sert de rappel constant. Chaque jour, les gens ont du mal à la voir. Certains arrivent à tenir le coup. Nos aînés sont forts. Mais qu'en est-il des générations actuelles? Qu'arrivera-t-il à nos enfants? Et que dire de nos petits-enfants?

Parlons carburant : Que fait la Nation pour tenter de guérir ce traumatisme?

Nos aînés tentent de nous aider à nous réapproprier notre langue et notre culture. Pouvoir utiliser notre langue d'origine pour communiquer est très important. Mon fils (Helena) est âgé de quatre ans et il apprend la langue de la Première Nation Dakota.

On a appris aux survivants des pensionnats à se sentir mal de participer à leur culture. Cependant, certaines familles sont en mesure de choisir de l'enseigner à leurs enfants. Mon père (Melissa) a choisi de faire découvrir notre culture à ses enfants. Et je l'enseigne à mes enfants.

Sur la réserve, nous avons créé un programme de services pour les familles, les Dakota Tiwahe Services, qui se consacre aux jeunes. Ce programme leur enseigne des traditions : la prise de médicaments, la confection de robes et de mocassins traditionnels. Des choses que les gens ne savent pas habituellement. De plus, il contribue à faire en sorte que les enfants de Sioux Valley restent à Sioux Valley. Nous ne voulons pas qu'ils soient placés dans une famille d'accueil à l'extérieur de la réserve. Les enfants doivent rester en contact avec leur culture. Notre réserve possède également un centre de santé qui offre des services de consultation.

Parlons carburant : Que peuvent faire les Canadiens pour aider à guérir ce traumatisme?

Il faut davantage se dire les vraies affaires. N'embellissons pas le passé. Ne faisons pas que lire un livre... sauf s'il est écrit par un auteur autochtone. Allons sur une réserve. Participons à des événements. Rencontrons une personne âgée et demandons-lui de nous raconter son histoire. Comprenons mieux la vraie histoire du Canada.

Voici un exemple d'une chose que chaque Canadien peut faire en ce sens : suivre le cours offert gratuitement par l'Université de l'Alberta sur le Canada autochtone (en anglais seulement). L'acteur canadien Dan Levy suit ce cours et il anime une séance de clavardage après chaque classe (en anglais seulement).

Parlons carburant : Que ferez-vous en cette Journée du chandail orange?

Cette semaine, toute notre équipe portera un chandail orange. Nous avons aimé qu'on nous demande quelle était leur signification. Nous sommes reconnaissantes que Suncor et Petro-Canada soient prêtes à nous aider à nous faire entendre.

Cependant, la Journée du chandail orange est aussi un rappel des mauvais traitements qui ont été infligés aux enfants.

Ce sont des vérités difficiles. Il faut reconnaître qu'il y a encore du racisme. Il ne faut pas nous dire de passer à autre chose. Il ne faut pas nous dire que « ces terres ne nous appartiennent plus » et que « nous devons coexister ». Si vous n'êtes pas autochtone, vous êtes un immigrant. Ne vous débarrassez pas de nous.

Parlons carburant : Qu'aimeriez-vous voir les Canadiens faire pendant la Journée du chandail orange?

Les Canadiens doivent tendre la main, poser des questions et mieux comprendre l'histoire du Canada. Cela leur fera vraiment comprendre la cause et l'effet. Ces chandails nous rappellent qu'à l'origine, nous étions un tout.

Lorsque je vois un chandail orange, je vois une multitude de petits visages... des visages d'enfants à qui on a enlevé leurs familles. Si vous voyez aujourd'hui un Autochtone qui est perdu et errant, n'oubliez pas qu'il n'est pas responsable de son sort. À cinq ans, il a été arraché à sa famille. Il n'a pas acquis les compétences dont il avait besoin lorsqu'il était jeune.

Les Canadiens doivent se poser les questions suivantes : Où tout cela s'arrête-t-il? Quand ce cercle vicieux prend-il fin?

Aux gens de race blanche qui traitent cette personne brisée de « perdant », d'« autochtone bon à rien », nous disons ceci : demandez à cet Autochtone ce qui est arrivé la journée où il a été pris. Comment vous sentiriez-vous si les rôles étaient inversés? Et comment se sentiraient vos enfants?

Chaque enfant compte. Même si ces enfants sont maintenant des adultes. Nous étions des guerriers et nous le sommes toujours. Cependant, notre combat est désormais un combat d'acceptation réelle.

Parlons carburant : Helena et Melissa… merci. Je ne peux vous dire combien vos histoires m'ont émue et transformée. Je suis reconnaissante que vous m'ayez fait confiance et c'est un honneur pour moi de les faire connaître à nos lecteurs.

Wopida Tanka ... un grand merci à vous et vos lecteurs pour avoir écouté attentivement nos histoires. Doshta ake ‘ ... À bientôt.

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Si vous souhaitez faire un pas de plus vers une meilleure sensibilisation aux peuples autochtones et la réconciliation, veuillez faire appel à ces ressources.

~Kate T.

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